Le rêveur exubérant
"Mon caractère ? s'interroge ROSTROPOVICH. C'est CHOSTAKOVITCH qui l'a dit un jour: "ROSTROPOVICH est vraiment doué pour tout." Si l'on énumère tout ce que j'ai fait dans ma vie, on peut évidemment soutenir que j'ai des possibilités." Et de citer ses talents de menuisier, de maçon, d'horloger, d'électricien. Et d'ajouter qu'il aurait aimé être médecin, ou avocat "pour aider les gens". ROSTROPOVICH, c'était l'exubérance, la gourmandise mais, tout en même temps, la rigueur dans le contrôle du moindre geste. Le musicien fut d'abord violoncelliste par transmission paternelle et - faut-il l'ajouter ? - le plus fabuleux violoncelliste de son temps; pianiste aussi, ce qui ne manqua pas de fortifier sa relation exubérante au début, chancelante parfois, avec son épouse Gaina VICHNIEVSKAÏA. Et son chef d'orchestre ("un rêve, bien avant d'avoir touché à un violoncelle !") afin d'explorer des répertoires, symphoniques et lyriques, auxquels le soliste, faute de nourritures substantielles, ne pouvait accéder.
Toujours le goût de la nouvelle aventure, la prise de risque, laquelle, sans se préoccuper des conséquences désagréables dont Galina avait jugé l'inéluctabilité, le conduisit à héberger son ami SOLJENITSYNE et, plus tard, à sauter dans le premier avion pour grimper sur une barricade aux côtés du président Boris ELSINE. Prise de risque aussi en qualité de militant des langages contemporains: il n'arrêta pas de harceler les compositeurs, multiplia les créations, instruisit le procès posthume de ses confrères des siècles passés qui ne se jetèrent pas aux pieds de MOZART, de BEETHOVEN, de BRAHMS ... "Je suppose que si un violoncelliste avait su enflammer SCHUMANN par son jeu, il ne se serait pas arrêté après avoir écrit un seul concerto !"
ROSTROPOVICH aurait aimé retrouver dans le même album (c'est chose faite !) son ami Benjamin BRITTEN, son grand partenaire russe en la personne de Guennadi RODJESTVENSKI et, avec SAINT-SAËNS, un représentant de la France où il vécut si longtemps. Quant à cette folle course à l'abîme de la Danse des Elfes de POPPER, elle aurait réjoui l'homme qui me dit un jour : " Au temps de notre jeunesse, nous étions un peu fous. Au Conservatoire, nous faisions avec nos classiques des courses de vitesse", courses que Slava gagnait, bien évidemment.
Claude SAMUEL
Claude SAMUEL
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