dimanche 11 novembre 2012

121111 - ECOUTE - FLEISHER, Leon


Une amitié musicale


          "Discipline de fer et énergie indomptable" : c'est par la tension de cette image que Christian Merlin, dans une discographie comparée du Concerto pour piano n°1 ,de Brahms,hissait l'enregistrement de Leon Fleisher et George Szell sur le podium des vainqueurs.Discipline, énergie ... ajoutons : tranchant. Ce tranchant propre au geste de Szell, idéalement relayé par le piano du jeune Fleisher. Tranchants l'un et l'autre, mais sans sécheresse, jamais. Et tranchant dès l'entrée en matière, renversante, où l'on mesure le savoir-faire des ingénieurs de la Columbia. Quel métier ceux-ci avaient acquis en seulement quelques années de stéréophonie!
          L'enregistrement s'effectue les 21 et 22 février 1958. Fleisher et Szell sont alors unis par une longue amitié, dont témoignent quelques photos pleines de sourires prises ces deux jours-là. Pourtant tout aurait dû séparer ces deux hommes, l'âge - une génération d'écart - et le passé. Celui de George Szell, multi-émigré depuis sa Hongrie natale jusqu'à l'Autriche, l'Allemagne et la France puis enfin les Etats-Unis, était symptomatique du parcours de tant de juifs d'Europe centrale ayant fuit les convulsions de l'Ancien Continent. Leon Fleisher, lui, alors âgé de vingt-neuf ans, était né à San-Francisco et ne connaissait la vieille Europe qu'à travers l'enseignement d'Arthur Schnabel - autre émigré célèbre. C'est précisément grâce à Schnabel, et grâce au disque, que l'étincelle entre Szell et Fleisher aura lieu. A douze ans, le jeune pianiste recevait de ses parents l'enregistrement (HMV) du Concerto n°1 de Brahms par Schnabel et Szell: "le grandiose tutti de l'ouverture est gravé pour toujours dans mon esprit. Je rêvais de jouer la pièce avec ce chef. Imaginez donc mon ivresse et ma terreur quand je fus présenté à George Szell, sa redoutable réputation l'ayant précédée aux Etats-Unis - yeux bleus, pâles mais pénétrants, lunettes aux verres épais cerclés d'or, feutre et pardessus noir. Imaginez mon excitation quand, en 1946, je jouais pour la première fois le Concerto en ré mineur de Brahms avec lui."
          Les années renforcèrent un rapport presque filial, comme l'histoire de l'interprétation n'en a pas connu beaucoup. Dans ce Concerto en ré mineur, d'abord pensé par Brahms comme une symphonie, le piano de Fleisher s'établit comme un magnifique obligato dans la définition sonore acérée de l'Orchestre de Cleveland. Le naturel des tempos, la perfection et d'abord la pertinence des détails, l'ampleur de la vision, l'unité, l'allure, sont l'évidence même.
Etienne Moreau. 



Leon FLEISHER (né en 1928)
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Johannes Brahms
Concerto pour piano n°1 en ré mineur
1 - Maestoso
2 - Adagio
3 - Rondo. Allegro non troppo


Ludwig van Beethoven
Concerto pour piano n°2 en si bémol majeur 
1 - Allegro con brio
2 - Adagio
3 - Rondo. Molto allegro


Leon Fleisher (piano)
Orchestre de Cleveland, George Zcell.
Enregistré en 1958 et 1961.  
   


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