LE
VOYAGE D'HIVER
24
lieder sur des poèmes de Wilhelm Müller
01
– Gute Nacht
02
– Die Wetterhahne
03
– Gefrorene Tränen
04
- Erstarrung
05
– Der Lindenbaum
06
- Wasserflut
07
– Auf dem Flusse
08
- Rückblick
09
- Irrlicht
10
- Rast
11
- Frühlingstraum
12
- Eisamkeit
13
– Die Post
14
– Der greise Kopf
15
– Die Krähe
16
– Letztz Hoffnung
17
– Im Dorfe
18
– Der stürmische Morgen
19
- Tâuschung
20
– Der Wegwaiser
21
- Das Wirtshaus
22
- Mut
23
– Die Nebensonnen
24
- Der Leiermann
Dietrich
Fischer-Dieskau, baryton
Gérald
Moore, piano
Enregistré
le 4 juillet 1955 à Prades
En 1823, les vingt lieder de La Belle Meunière conduisaient à la noyade du jeune meunier. Mort symbolique peut-être, car Le Voyage d'Hiver, quatre ans plus tard, s'ouvre sur Gute Nacht : "Bonne nuit", mots chantés par le ruisseau à la fin du cycle précédent. SCHUBERT s'y prend en deux temps : la première moitié entre février et le printemps 1827; la seconde à l'automne, après la découverte de nouveaux poèmes de Wilhelm MÜLLER. Depuis La Belle Meunière, le ton a changé, pour creuser les abîmes du désespoir et de la solitude au fil d'une errance sans fin :"Et moi, je marche sans mesure; sans repos, je cherche le repos" (N°20). Inutile alors de consulter le poteau indicateur(N°20) et d'invoquer le courage (N°22). Les paysages glacés reflètent les émotions du narrateur et intensifient sa douleur : "Mon cœur, en ce ruisseau, reconnais-tu à présent ton )mage?" (N°07). Quand la nature s'anime, les rafales du vent fouettent le Wanderer (N°02,05,16 et 18). La neige pique la peau comme les larmes (N°03,04,06 et 08) : "Le sol est brûlant sous mes semelles, bien que je marche sur la glace et la neige" (N°08).
La conception dramatique a également évolué. Il s'agit moins d'une narration, au sens habituel du terme, que d'une succession d'états d'âme. L'unité du cycle réside dans la récurrence des images poétiques et de certains gestes musicaux : écriture dépouillée traduisant le vide intérieur du personnage ; brefs motifs obsédants comme le souvenir de la bien-aimée ; harmonie qui s'éclaire fugitivement et rend plus déchirant le retour au mode mineur (seize des vingt-quatre lieder sont en mineur !) ; scansion de marche funèbre (N°01,03,07,10,12,15 et 20) s'immobilisant dans un tempo étiré (N°21) ; sèches ponctuations du piano (N°03,07 et 16). Quelques échos de musique populaire renvoient au bonheur perdu (N°05 et 13) ou signalent un rêve éveillé (N°11). Le Voyage d'Hiver est d'ailleurs jalonné d'illusions que dissipe vite la cruelle réalité (N°09,11,19 et 23). La trajectoire se dessine imperceptiblement.
Les irruptions de violence, d'autant plus saisissantes qu'elles restent brèves, sont plus fréquentes dans la première partie. Solitaire jusqu'au N°12, le Wanderer croise une sinistre corneille (N°15), des chiens hostiles (N°17) puis un pauvre joueur de vielle, sa propre image (N°24) : "Etrange vieillard, m'en irai-je avec toi ? Veux-tu bien accompagner mes chants au son de ta vielle ?" En 1828, SCHUBERT rencontrera à nouveau son double chez HEINE (Der Doppelgänger) et poursuivra son voyage. Ses derniers chefs-d'oeuvre (sonates pour piano, quintette à deux violoncelles, Le Chant du cygne) explorent des gouffres insondables mais scellent aussi la réconciliation avec l'Ame du monde (Weltseele).
Hélène Cao.
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