Comment le chapeau de François Mitterrand passe de tête en tête et bouleverse les destins tel un mystérieux talisman.
«Je crois aux forces de l'esprit», annonça un jour François
Mitterrand au peuple français médusé auquel il présentait ses derniers
vœux présidentiels. Le facétieux Antoine Laurain, qui publie son
quatrième roman, s'est manifestement souvenu de cette phrase étrange en
faisant du chapeau de François Mitterrand une façon de talisman
traversant l'existence d'une suite de personnages dont la vie est
bouleversée par le mystérieux galurin.
Au commencement, il y a
Daniel Mercier, un comptable un peu falot qu'on dirait échappé d'un
roman de Michel Houellebecq. Daniel profite d'une soirée de célibataire
pour s'offrir un plateau de mer royal dans une grande brasserie
parisienne.
Lui seul, parmi les personnages du livre, sait
que le feutre qu'il a l'audace de poser sur sa tête a appartenu
au président de la République. Il l'a vu s'asseoir en personne à ses
côtés et oublier son couvre-chef à la fin du dîner. «François
Mitterrand a oublié son chapeau. La phrase prenait corps dans son
esprit. C'est le chapeau de Mitterrand. Il est là, à côté de toi. C'est
le témoignage de la réalité de cette soirée, la preuve absolue qu'elle a
bien eu lieu.»
Immunisé contre les tourments de la vie quotidienne
Soumis
à un management impitoyable, Daniel Mercier nanti d'un chapeau tout
neuf va trouver la force de se révolter. «Le chapeau. Lui seul était
responsable des derniers événements qui bouleversaient son existence.
Daniel en était persuadé. Depuis qu'il le portait, sa seule présence
l'immunisait contre les tourments de la vie quotidienne.»
Mais à
son tour Daniel va oublier l'énigmatique couvre-chef. De sa tête, il va
ainsi passer sur celle de Fanny Marquant, qui se trouve avoir les mêmes
initiales que le président. Puis de celle de Fanny Marquant à celle de
Pierre Aslan…
Faisant passer le chapeau de Mitterrand de tête en
tête, Antoine Laurain mène son roman avec allégresse. À un moment, le
chapeau du président va même transformer un fidèle lecteur du Figaro en lecteur de Libé!
On
pense souvent à Marcel Aymé en lisant ces pages qui sont l'occasion
d'une jolie promenade au cœur des années 1980. Ce n'est pas le moindre
des compliments.
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