J’apprends l’allemand a tout pour devenir
un classique. Le lien entre les maux de l’enfance et les secrets
familiaux ; l’alternance de la première et de la troisième personne, et
parfois la parole donnée à d’autres personnages, et surtout
l’entrelacement de la découverte de la sexualité et particulièrement de
l’homosexualité en contrepoint à la révélation du passé nazi des deux
familles, tout cela concourt à frapper durablement l’esprit du lecteur.
Résumé
Tout petit, Ernst Wommel a failli perdre l’usage d’un œil. Il ne l’a
conservé que grâce à d’interminables séances de rééducation chez le
docteur Salavoux. Son grand frère Max et lui n’ont pas d’autre famille
que leurs parents Horst et Katarina, Allemands installés en France. Ils
ne parlent jamais allemand devant leurs enfants, et ne leur ont jamais
révélé la raison de leur exil. À l’école, on traite les frères de
« sales boches », ou de « Rommel heil Hitler ». Max ne s’intéresse pas à
ce passé interdit, mais Ernst choisit l’allemand comme langue vivante
en sixième. Lors de son premier échange scolaire, il fait la
connaissance de son correspondant Rolf. Ils couchent dans deux lits
superposés, et le premier soir, Ernst « comprend que Rolf se branle »
(p. 55). Le surlendemain, il l’accompagne dans ce « petit tremblement de
terre quotidien » (p. 59), et ainsi de suite. Le grand-père de Rolf
parle à Ernst de son travail de « soldat dans la Wehrmacht » à Dachau.
Rolf est choqué, le grand-père ne lui avait jamais dit la vérité. À son
retour en France, Ernst apprend que ses parents se séparent. Il
s’installe avec sa mère dans le grand appartement de… M. Salavoux. Les
rapports avec son père sont toujours tendus, mais sa mère semble être
« démuselée par la séparation » (p. 103). Elle évoque plus facilement le
passé. Ernst passe un mois tous les étés dans la famille de Rolf, qui
lui présente sa copine. Ils resteront amis, liés par leur désir commun
d’archéologie familiale. Ernst fait la connaissance de Peter, l’oncle de
Rolf en rupture avec la famille, et de son petit copain juif, Art.
Après son bac, Ernst s’installe en Allemagne et consacre son énergie à
retrouver son grand-père, et à interviewer toute la famille de Rolf et
la sienne. Des deux côtés, les histoires ne sont pas très gaies. « Je te
connaissais déjà, pépé, tu chantes dans mes cauchemars depuis
toujours » (p. 170). Peter explique sa révolte contre ses parents : « Un
petit mari qui rentre tous les soirs après avoir fait sa journée au
camp […] Et comment s’est passée ta journée mon chéri ? Et combien de
juifs a dévoré ton chien ?… Et combien de pédés as-tu broyés avec la
crosse de ton fusil ?… » (p. 163). Ernst sait, il peut vivre
sereinement.
|
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire